La loi PACTE a été adoptée par les députés le 9 octobre 2018 après plusieurs semaines de débats. Au menu de ce texte de loi, on retrouve de nombreuses mesures pour faciliter la vie des PME. Parmi ces nouveautés, un amendement qui surprend : les noms des mauvais payeurs seront rendus publics.
Alors qu’il n’était que ministre de l’Économie, Emmanuel Macron n’avait déjà pas hésité à montrer du doigt les grandes entreprises responsables des plus gros retards de paiement : une conférence de presse donnée à Bercy en novembre 2015 avait ainsi vu Numericable, Airbus Helicopters ou le charcutier Paul Prébault épinglés au tableau de déshonneur de l’économie française.
Si la même logique s’applique aujourd’hui aux mauvais payeurs avec la Loi PACTE (Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises), c’est pour permettre aux PME de ne pas être étranglées par les retards de paiement. Certaines voyaient en effet leur existence mise en danger par les grosses factures impayées : on avoisinerait chaque année les 200 milliards d’euros de créances sur le marché français. Les secteurs du BTP, des transports et de l’industrie alimentaire sont les plus touchés.
Avec les lois PACTE et Sapin, la DGCRF veille au grain
Les délais de paiement sont déjà réglementés par la DGCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes). Par défaut, on dispose de 30 jours à compter de la réception des marchandises, ou client et fournisseur peuvent s’accorder sur un délai maximum de 60 jours après émission de la facture, ou 45 jours à compter de la fin du mois d’émission de la facture : telles sont les grandes lignes de la loi que la DGCRF fait respecter.
Depuis la Loi Sapin II de 2016, la DGCRF pouvait déjà publier sur son site internet et dans la presse les noms des entreprises condamnées pour défaut de paiement, en supplément des amendes administratives (jusqu’à 2 millions d’euros pour les personnes morales).
Avec l’amendement apporté à la loi PACTE, ce relais médiatique des condamnations sera désormais systématique. Le texte précise que la publication se fera dans la presse locale, aux frais du condamné, et éventuellement dans d’autres supports médiatiques laissés à l’appréciation de la DGCRF pour les fautes plus graves.
La stratégie du « name and shame », un bonnet d’âne dissuasif
Montrer du doigt publiquement les fautifs est une pratique courante dans la culture anglo-saxonne qui lui a donné le nom de « name and shame » (nommer pour couvrir de honte). C’est précisément cette stratégie que met en place la loi PACTE, comme l’expliquait à la presse le Ministre de l’économie Bruno Lemaire : « Je crois au caractère dissuasif de cette disposition car pour une société, il n’y a rien de plus précieux que sa réputation ».
Il faut donc maintenant voir si la dissuasion, et la crainte de voir son image publique ternie, sont des tactiques qui fonctionnent. L’étude Altares portant sur le 2e trimestre 2018 montrait un délai de paiement au plus bas en France depuis dix ans, avec une moyenne de 10,7 jours (contre 17,5 en Irlande ou 26,6 au Portugal). Mais sur la fin d’année, ce délai semble repartir légèrement à la hausse, et les relations entre clients et fournisseurs se tendent. Le name and shame mis en place en 2019 avec la loi PACTE devra donc limiter la casse.