Ca y est, les effets de la crise sanitaire sur l’économie se font sentir. 2020 semblait avoir étonnamment épargné les entreprises, le taux de défaillance ayant atteint un niveau historiquement bas. Mais les acteurs du secteur l’anticipaient : ces chiffres cachaient une réalité alarmante, la vague de défaillances arrive en 2021.
La reprise attendue avec impatience… et crainte
Le quidam s’en réjouit à juste titre : les campagnes de vaccination s’affichent comme un remède efficace à l’immobilisation du pays. Fort à parier que d’ici quelques semaines, bars et salles de sport ouvriront de nouveau leurs portes pour une reprise de la vie sociale qui satisfera les consommateurs.
Pourtant l’inquiétude pondère l’enthousiasme chez les entreprises.
- Tout d’abord, dans quelle mesure le consommateur consommera-t-il ? La crainte du virus persiste dans l’esprit de certains, tous ne seront pas enclins à revenir alimenter les caisses de leurs commerçants favoris.
- Et en tout état de cause, les finances du consommateur post-Covid-19 seront-elles suffisantes aux commerces pour refaire leur trésorerie ? Si les professionnels ont été immédiatement impactés par la crise, les particuliers pour leur part sont parfois en sursis. Mis en chômage partiel, ils ne sont pas assurés de retrouver leur poste. La menace de licenciement plane et pourra justifier une attitude prudente : pas sûr que l’effusion soit au rendez-vous au moment de rouvrir les commerces.
- Au-delà des perspectives de consommation, les entreprises font face à une autre angoisse majeure. La reprise risque de signer la fin (progressive) des aides. Ces aides mêmes qui les maintenaient financièrement…
Mars 2021 tire la sonnette d’alarme
Au 1er trimestre 2021, les chiffres a priori se maintiennent optimistes. Moins de 7 500 procédures collectives ouvertes – données Altares – un nombre très inférieur en comparaison aux années précédentes. Effectivement, si la crise sanitaire emporte une crise économique, l’Etat n’a pas manqué de réagir : au-delà de la mise au ralenti de l’activité judiciaire, ce sont les mesures d’aide mises en place qui continuent de produire leurs effets. Des effets vertueux, puisque l’activité est maintenue, mais quelque peu pervers. Car les entreprises pour beaucoup sont sur le point de se faire rattraper : les aides financières ne suffisent plus à celles dont les problèmes de trésorerie sont irrémédiables.
Et ce mois de mars illustre tristement le mécanisme. Pour la 1ère fois depuis la crise Covid-19, le nombre de liquidations judiciaires directes atteint un record : au moment d’ouvrir une procédure collective, 8 entreprises sur 10 sont liquidées sans passer par la case redressement judiciaire.
- Habituellement, c’est environ 66% des procédures collectives qui aboutissent immédiatement en liquidation judiciaire.
- En période Covid-19, jusque-là, le chiffre était porté à près de 75%.
- Désormais, près de 80% des entreprises défaillantes sont directement liquidées.
Des entreprises démunies à la veille de la reprise
Pour certains secteurs, impossible de faire face. Discothèques, stations de ski, évènementiel, culture… ces commerces de produits et/ou services se trouvent démunis, et les opportunités de la transformation digitale ne servent manifestement pas leurs intérêts. Les dettes s’accumulent et elles ont consommé la totalité des fonds de leur PGE. Psychologiquement en outre, les dirigeants s’essoufflent, ne sont plus en mesure d’envisager des perspectives de rétablissement optimistes pour l’après Covid-19.
Face à ces situations, le Tribunal n’a d’autre choix que d’organiser leur liquidation judiciaire, sans autre alternative.
Au 3ème trimestre 2021, c’est le taux de liquidations judiciaires directes qui vient illustrer l’impact de la crise sur l’économie. Et c’est sans compter ces entreprises actuellement en procédure de sauvegarde ou de conciliation, dont les chiffres ne font pas état. Parviendront-elles à se relever ? L’Etat prévoit-il de nouvelles mesures pour accompagner la fin des aides ? Les entreprises sont sur le qui-vive – et leurs salariés également.