La Cour de cassation rappelle les modalités de la prescription de l’action paulienne
Pour rappel sur l’action paulienne : la loi autorise le créancier à demander l’inopposabilité d’un acte effectué par le débiteur en fraude aux droits du créancier. Exemple : le débiteur organise son insolvabilité pour ne pas honorer ses dettes.
L’action paulienne entre dans le champ d’application de la prescription de droit commun : 5 ans à compter du jour où le créancier a connu ou aurait dû connaître les faits. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 08 décembre 2021.
Les faits :
- L’associée d’une SNC se porte caution solidaire de sa société auprès de la banque.
- Le 07 septembre 2011, l’associée fait publier au service de la publicité foncière un acte de donation-partage de son immeuble au profit de ses enfants.
- La SNC est mise en liquidation judiciaire et la caution est appelée en garantie. Pour recouvrer l’intégralité de sa créance, la banque assigne les enfants bénéficiaires de la donation-partage sur le fondement de l’inopposabilité de l’acte, en décembre 2016.
Les enfants bénéficiaires de la donation-partage fondent leur défense sur la prescription de l’action paulienne de la banque : entre la publication de l’acte, en septembre 2011, et l’assignation de la banque, en décembre 2016, le délai de 5 ans est écoulé et l’action paulienne est prescrite. Les juges estiment que la publication au SPF suffit à dûment informer la banque, qui « aurait dû connaître les faits ». Les enfants obtiennent gain de cause en appel, et la Cour de cassation confirme.
La Cour de cassation confirme l’irrégularité d’une inscription hypothécaire prise après le décès
Les faits :
- 2011 : le service des domaines est désigné curateur d’une succession vacante.
- 2013 : deux créanciers font inscrire une hypothèque sur un immeuble de la succession.
- Le curateur de la succession vacante assigne les créanciers hypothécaires en mainlevée de l’inscription hypothécaire, sur le fondement de son inopposabilité aux autres créanciers.
Dans un arrêt du 05 janvier 2022, la Cour de cassation accueille favorablement la demande. Le raisonnement est le suivant :
- Conformément à l’article 2422 du Code civil, anciennement article 2427 modifié par l’ordonnance du 15 septembre 2021, « L’inscription ne produit aucun effet entre les créanciers d’une succession si elle n’a été faite par l’un d’eux que depuis le décès, dans le cas où la succession n’est acceptée qu’à concurrence de l’actif net ou est déclarée vacante ». Si la vacance de la succession ne fait pas obstacle aux poursuites individuelles, la règle de l’arrêt du cours des inscriptions est applicable.
- L’inscription hypothécaire prise après le décès est frappée d’irrégularité : la demande de mainlevée est fondée.
- Le curateur d’une succession vacante est compétent pour demander la mainlevée de l’inscription hypothécaire irrégulière, conformément à sa mission d’organisation du règlement du passif.
La Cour de cassation précise le point de départ de la prescription de l’action de la banque contre les héritiers de l’emprunteur
La situation en l’espèce met en jeu un prêt consenti par un professionnel à un consommateur. Pour rappel : l’article L218-2 du Code du commerce prévoit que « L’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ». La cour de cassation, dans son arrêt du 20 octobre 2021, précise le point de départ du délai de prescription.
Les faits :
- 02 décembre 2015 : l’identité des héritiers de l’emprunteur décédé est portée à la connaissance de la banque.
- 05 décembre 2017 : la banque prononce la déchéance du terme. En 2018, la banque fait délivrer aux héritiers un commandement de payer.
- La Cour d’appel juge que l’action en remboursement de la banque est prescrite, dans la mesure où le délai de 2 ans démarre au jour où la banque a eu connaissance de l’identité des héritiers.
La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel au motif suivant :
- Conformément à l’article 2233 du Code civil, le point de départ de la prescription de l’action de la banque en remboursement du capital restant dû est la date à laquelle la banque prononce la déchéance du terme.
La Cour de cassation en profite pour rappeler qu’à l’égard d’une dette payable par termes successifs, « l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives ».
Il convient en outre de rappeler que le point de départ de la prescription sera porté au jour où la banque a connaissance de l’identité des héritiers dans l’hypothèse où cette date est postérieure à la date de déchéance du terme.