Nantissement d’assurance vie : les effets maintenus jusqu’au remboursement du prêt garanti
Juillet 2020 : le nantissement du contrat d’assurance vie devenait le « roi des sûretés » quand la Cour de cassation consacrait le droit exclusif du créancier nanti, à l’exclusion de tout autre créancier.
Pour rappel sur le nantissement de l’assurance vie :
- L’emprunteur donne son contrat d’assurance vie en garantie du prêt accordé par la banque.
- Pendant la durée de l’emprunt, le contrat se poursuit dans les conditions classiques de l’assurance vie.
- En cas de défaut de remboursement, la banque procède au rachat du contrat nanti à hauteur des sommes dues.
Mars 2021 : l’efficacité du nantissement de contrat d’assurance vie est encore renforcée. La Cour de cassation affirme, dans un arrêt du 10 mars 2021, que le bénéficiaire ayant consenti le prêt garanti « a droit au paiement de la valeur de rachat tant que celui-ci n’a pas été remboursé ». Peu importe que le terme du prêt soit échu.
- Les faits : une banque consent un prêt à une entreprise, le contrat arrive à échéance en 2011. Le remboursement du prêt est garanti par le nantissement d’un contrat d’assurance vie. L’entreprise est mise en redressement en 2009, puis en liquidation en 2013, alors que le prêt n’est pas remboursé. La banque obtient le paiement de la valeur de rachat du contrat, puis est condamnée à rembourser les sommes. Le motif de la Cour d’appel : la durée du nantissement est celle du prêt, ayant expiré en 2011.
- La décision de la Cour de cassation : le contrat de prêt expire à la date du parfait remboursement, et le nantissement produit ses effets jusqu’à cette échéance – sauf volonté contraire expresse des parties.
L’action paulienne recevable pour rattraper un partage de communauté à la hâte
Le partage de communauté conséquent à un changement de régime matrimonial, lorsqu’il est organisé de manière à masquer une fraude, tombe sous le coup de l’action paulienne. C’est ce que rappellent les juges de la Cour de cassation, dans un arrêt du 17 février 2021.
Le contexte :
Les conditions pour changer de régime matrimonial se sont progressivement assouplies. Si les époux y gagnent, leurs créanciers non avertis ont beaucoup à perdre…
En l’espèce, un couple marié sous le régime de la communauté change pour la séparation de biens. A ce moment-là, lui est associé d’une société en état de cessation de paiement, et coupable de délits financiers. Le partage est organisé rapidement, lui reçoit les parts sociales et elle les biens immobiliers du couple – les mettant ainsi à l’abri des créanciers. S’estimant lésé, un créancier de la société conteste le partage, sur le fondement de la fraude. En appel, l’action paulienne est jugée recevable et fondée, la Cour de cassation confirme la décision.
A retenir en l’espèce :
- C’est la date à laquelle le créancier prend connaissance de la fraude qui fait courir le délai de prescription quinquennale, peu importe que le créancier ait été préalablement informé du partage.
- Le caractère hâtif du partage rend l’action paulienne recevable, notamment lorsque le partage intervient avant l’expiration du délai de 3 mois d’opposabilité aux tiers.
- Le déséquilibre de la répartition des biens en valeur rend le partage fictif et présume la complicité du conjoint.
Malgré l’assouplissement des conditions de changement de régime matrimonial, l’action paulienne de l’article 1341-2 du Code civil continue donc de protéger les créanciers de l’époux en cas de fraude. Et ce même s’ils n’ont pas fait opposition.